Une réforme ferroviaire pour quoi faire ?

Publié le par AlainG

La réforme du système ferroviaire français est rendue nécessaire par l’évolution de la réglementation européenne et surtout par l’ouverture du marché de ce mode de déplacement. Depuis maintenant deux décennies, l’État français se désengage progressivement par une libéralisation du système au profit d’un modèle entreprenarial et sans autre considération que financière. Hors, ce mode de transport répond aussi à d’autres enjeux supérieurs que sont l’aménagement du territoire et surtout le changement climatique par le renforcement d’alternatives au tout routier.

Dans le rapport demandé à Jean-Cyril Spinetta par le Premier Ministre, la lettre de mission (page 121) pouvait laisser augurer que ces questions seraient au coeur de la réflexion mais rapidement il s’agit plutôt de considérer cette phase de transition avec l’ouverture du marché et SURTOUT d’avoir un regard comptable sur le fonctionnement de ce service public.

Dans l’ensemble du rapport, le sujet principal concerne la rentabilité économique et jamais l’aménagement équilibré du territoire. Sur les lignes peu empruntées, la question n’est pas posée de savoir si le service proposé correspond aux besoins de la population, si les horaires sont adaptés, si les fréquences de desserte sont les bonnes. Avec la contrainte énergétique, l’existence d’un réseau ferroviaire constitue une opportunité pour changer (en partie par la contrainte) les déplacements régionaux et nationaux pour peu que l’alternative par le rail soit crédible. Il est certain qu’une petite ligne avec des horaires peu adaptés ne peut être concurrentielle face à une desserte routière de tous les instants. Mais qu’en sera-t-il quand le coût des énergies fossiles sera à son juste niveau ? Et le coût de la sécurité ?

Par ailleurs, si les propositions d’amélioration des lignes très utilisées sont nécessaires, elles ne doivent pas l’être au détriment du reste du réseau, sauf à confirmer la dichotomie entre les métropole et le « désert français » dénoncée en son temps.

Périodiquement, à l’occasion d’accidents ou de problèmes de pollution aigüe revient le « marronnier » du ferroutage privilégiant le transport de marchandises par train plutôt que par camion. Cette alternative constitue en effet une solution raisonnable sur le transport de longue distance qui répond par ailleurs à d’autre enjeux de sécurité et d’économie budgétaire sur le renouvellement des infrastructures routières (limitation de l’usure des chaussées) mais elle ne peut s’envisager que par un investissement public permettant « d’amorcer » une pompe qui ne trouvera son équilibre financier que dans un temps long. L’initiative privée de la ligne Le Boulou – Luxembourg est bien isolée et toujours en recherche d’un équilibre durable. On ne peut à la fois appeler de ses vœux un changement de société et ne rien entreprendre … C’est portant ce qui se passe actuellement sur le transport de fret. L'ouverture de ce segment de marché en 2006-2007 a-t-il réellement débouché sur un développement de ce modèle ? Assurément non. Il ne faut pas se plaindre après d'avoir trop de camions sur nos routes ...

S’agissant de la dette de la SNCF, elle n’est pas totalement imputable à l’entreprise, les choix stratégiques de dessertes par le TGV ayant été par le passé des décisions avant tout politiques avant d’être des choix techniques. Sans parler des choix financiers parfois hasardeux au travers du partenariat public privé (PPP) qui risquent là aussi de contribuer sur le long terme à la dette (LGV Tours-Bordeaux). Pour autant, faut-il arrêter tout développement de nouvelles LGV ? Si l’on se place une nouvelle fois dans la perspective du changement climatique, il faudra bien que les grandes métropoles régionales privilégient les déplacements par mode ferroviaire plutôt que par l’avion à l’échelle continentale. La barrière des 3h est une réalité qui contribue à cette évolution du trafic au bénéfice du train et au détriment de l’avion (voir sur des liaisons entre Paris et Marseille) pour lequel on n’a pas encore trouvé d’alternative à grand échelle au kérosène. L'avion doit être "réservé" aux liaisons intercontinentales et moins aux déplacements domestiques

Étrangement, dans les échos médiatiques actuels suite à la publication du rapport de JC Spinetta qui se concrétise avec l’enclenchement immédiat de la réforme de la SNCF, le Ministre de la Transition écologique et solidaire reste discret. Que pense Nicolas Hulot de ce rapport et de cette réforme à venir ?

21/02/2018

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article